Contre les amoureux

Nous nous plaignons que notre pays n'est pas toujours celui de toutes les libertés, mais que dirions-nous si nous étions citoyen de certaine grande république où la menace du "judge" est pour ainsi dire perpétuelle contre tout le monde en général et contre les amoureux en particulier ?

C'est ainsi qu'un citoyen de St Louis (E.U) fort agacé de voir que son futur gendre faisait sa cour, jusqu'à une heure vraiment trop tardive, lui dit un soir, sans aucun ménagement. "A partir de demain, mon jeune ami, vous partirez beaucoup plus tôt, ou nous verrons !" Le lendemain et jours suivants, le jeune homme partit un peu plus tard et le papa, exaspéré, en dépit de tout ce que sa fille put lui dire, crut n'avoir d'autres ressources que d'en appeler au tribunal, et les juges de Louisiane déclarèrent solennellement que onze heures du soir devait être le dernier délai à accorder pour une visite de fiancé, les parent passé cette heure, étant tout à fait libre "d'expulser les récalcitrants".

Les magistrats de Chicago furent pour le moins aussi sévères, eux qui rendirent un arrêt aux termes duquel le futur époux pouvait et devait se voir autorisé à courtiser sa fiancée une fois par semaine, mais qu'un plus grand nombre de visites pouvait être parfaitement interdit par la famille de la demoiselle. Ce jugement draconien était rendu en faveur d'une dame qui voulait bien marier sa belle-fille, mais refusait absolument d'admettre chaque jour chez elle un jeune monsieur qui semblait avoir élu domicile dans son salon.

A Atlantic-CityAtlantic-City, la jeunesse est beaucoup plus malheureuse encore, et bien que ce soit une ville très mondaine, on y est d'une rigueur extrême contre ceux qui font mine de s'aimer un peu trop - en plein air. L'automne dernier, n'a-t-on pas vu des agents de police courir sus à d'innocents fiancés qui se "bécotaient" gentiment pour leur dire d'un ton rogue ; "Not a kiss ! (Pas un baiser !) Cela est interdit sur la plage :"

Amateurs de longues lunes de miel, ne faites pas le voyage d'Amérique - et encore moins celui d'Atlantic-Cityd'Atlantic-City.

Article du "Journal des Fiancés" - Avril 1907