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Le blog du passé
16 novembre 2007

Une loi sociale de 1906

Les fêtes de la Grande Semaine sont ont empêché d'exprimer aux membres du Parlement, nos félicitations bien sincères pour le vote définitif de la loi sur le repos hebdomadaire. C'est une omission que je tiens d'autant à réparer que nous n'avons hélas, que bien rarement l'occasion de féliciter nos représentants. Il était à craindre qu'à cinq ou six jours des vacances parlementaires, la Chambre ne fût tentée d'apporter aux texte revenu du Sénat des modifications qui auraient eu pour résultat d'ajourner à la session d'hiver cette réforme si impatiemment attendue par toute la démocratie. Nos députés ont été bien inspirés en renonçant à donner, immédiatement, à la loi le tour de peigne, comme eût dit Montaigne, dont elle a, certainement, besoin. Si le ministre fait diligence, le règlement d'administration publique pourra être mis rapidement au point et nous jouirons, enfin, des bienfaits d'une loi éminemment sociale.
Le ministre aura aussi à en préciser certaines définitions un peu vagues, certaines expressions ambiguës, comme il devra munir d'instructions nettes et détaillées les préfets et les inspecteurs du travail chargés d'en assurer l'application.
Faire de bonnes lois ne suffit pas  ; il faut encore tenir la main à ce qu'elles soient obéies et respectées.
Nous ne doutons pas que cette satisfaction ne nous soit promptement accordée par le gouvernement : les employés de commerce sauraient, d'ailleurs, s'il les oubliait, se rappeler à son souvenir.
C'est à eux, en effet, il convient de leur rendre cet hommage mérité, c'est à l'activité infatigable de leurs associations et syndicats, que nous sommes, en partie, redevables du résultat consolant que nous venons d'enregistrer.
Si la chose avait dépendu de la conviction, de la générosité, du talent et du zèle d'un ou de plusieurs parlementaires, le repos du dimanche serait conquis depuis pas mal d'années. Car l'idée n'a jamais manqué à la Chambre, de champions au coeur chaud, au verbe entraînant comme elle ne manquait pas, dans nos grandes et petites villes, d'apôtres jamais las et jamais rebutés.
Mais il faut dire, parce que c'est vrai, ces bonnes volontés même localisées par le lien de la vaillante Ligue pour le repos du dimanche, toutes seules, n'auraient pas abouti.
Je complimente les syndicats de la façon énergique et calme à la fois, dont ils ont soutenu leurs justes revendications. La loi sur le repos hebdomadaire restera une des plus belles, des plus pacifiques victoires à l'honneur de l'organisation syndicale.
C'est aussi, dans une certaine mesure, une victoire du libéralisme sur l'esprit de secte. Combien de parlementaires, j'en ai pour garant M. Arthur Rozier lui-même, député socialiste de la Seine, "auraient volontiers sacrifié le repos hebdomadaire lui-même à la crainte de donner une satisfaction au parti clérical ?"
Ces anticléricaux farouches ont fini, sous la poussée des syndicats acquis, eux, au repos dominical, par se rendre à l'avis de la raison.
Est-ce à dire que la loi soit suffisante ? Non, l'opposition des derniers partisans du "laissez faire et laissez passer" a eu pour résultat d'en éliminer certaines dispositions qui finiront par s'imposer. Nous aurions souhaité voir aboutir le projet bien plus libéral de M. de Las Cases : mais étant donné l'esprit des radicaux du Luxembourg, nous devons nous estimer bien heureux, pour le moment, de ce que nous avons.
Il est bien entendu que la durée de vingt-quatre heures prescrite par l'article premier ne suffit pas. Qu'est-ce qu'un repos qui partirait du samedi minuit au dimanche minuit ? Et cette insuffisance s'aggrave du fait que les heures de départ et d'expiration de la période de 24 heures ne sont point indiquées dans le texte.
De même est abusive, la faculté laissée aux patrons de petits établissements de remplacer la journée de repos par deux demi-journées prise en roulement.
Mais si les syndicats d'employés savent vouloir, s'ils continuent leur admirable campagne ils obtiendront les trente-six heures de repos qu'ils réclament.
Ils nous trouveront toujours avec eux, nous et nos amis, pour les appuyer et pour aider, dans la mesure de nos moyens, à leur affranchissement de plus en plus complet de tout travail dominical.
Nous n'avions peut-être, pas besoin de le leur dire : ils le savent.

Urbain FALAIZE - Article paru dans le Havre-Eclair du Samedi 14 juillet 1906

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