L'A.J.S. la première grande moto de course

1920 - La moto est encore très jeune mais, déjà des compétitions se déroulent dans toute l'Europe ; en Angleterre, la fameuse course Tourist Trophy va avoir lieu pour la treizième année consécutive. Cette fois, au milieu des motos de tourisme, pas spécialement préparées, apparaît une élégante mécanique toujours noire. Son nom, peint en lettres d'or : A.J.S., tout simplement les initiale des constructeurs Andrew et Jack Stevens ; c'est la première machine véritablement conçue pour la course. Le tricycle est mort, vive la moto. Au début du siècle, deux jeunes anglais, les frères Stevens s'étaient lancés dans la construction de tricyles à moteur qui ne tardèrent pas à s'effacer devant les deux roues. Puisque c'était le choix du public, on lui en offrirait... C'est ainis que, dès 1904, la marque A.J.S. proposait aux amateurs de motos des machines bénéficiant d'une bonne réputation.

Mais... voici 1920. Jack Stevens est maintenant un homme dans la force de l'âge qui a beaucoup regardé autour de lui, beaucoup appris, et travaillé encore davantage. Son sens de la mécanique exceptionnel lui permet de mettre au point la machine qu'il aligne au Tourist Trophy.
Son élégance lui vaut un préjugé favorable mais, en compétition, et surtout dans une  épreuve aussi sévère que celle-là, l'élégance ne pèse pas lourd. On dit, ici et là, que cette 350-349 cm3 exactement - peut atteindre les 130 km/h, ce qui est extraordinaire ; mais pendant combien de temps ?

Dès le départ le ton est donné : l'A.J.S. bat le record du tour à  82,232 km/h de moyenne - une performance remarquable. Au dernier tour, elle possède seize minutes d'avance sur ses concurrentes, chose jamais vue. Cyril William, son pilote, savoure déjà sa victoire quand, à 5 kilomètres de l'arrivée, c'est la panne sèche ! Poussant résolument sa moto dans le plat, l'enfourchant dans les descentes - heureusement nombreuses et rapides - il réussit tout de même à franchir la ligne avec neuf minutes d'avance sur le deuxième concurrent. Victoire à l'arraché tout de même !

Pour Jack Stevens, s'ouvrait une ère aussi dorée que les lettres A.J.S. sur la moto. Sa 350, bien que pourvue d'un moteur relativement classique à l'époque, était équipée de six rapports de vitesse ! Continuellement améliorée, elle n'allait plus cesser de se faire remarquer ni de remporter des victoires. Alors, sans doute enhardi par ses succès Jack Steven chercha à élargir sa gamme, notamment dans des cylindrées supérieures.

Mais, seules ses 350 cm3 connurent le succès, le public leur faisant un véritable triomphe, particulièrement au modèle de sport B 1. Sorti en 1923, il offrait déjà une fourche-avant permettant une suspension efficace, et, surtout, il était pourvu à l'avant et à l'arrière de freins à tambour.

Les efforts téméraires de Jack Stevens pour s'évader de sa 350 et diversifier son écurie, tournèrent si mal qu'il dut vendre son entreprise. La firme A.J.S., bénéficiant du prestigieux passé de la marque, contina... avec une nouvelle direction. Elle sortit, en 1938, une 500 cm3 - 4 cylindres en V à compresseur - refroidie par eau : un monstre pourvu de deux magnétos, de quatre tuyaux d'échappement et de trois chaînes de distribution et de transmission, accusant, tenons-nous bien, quelques... 185 kilos... alors que ses rivales en pesaient 40 à 45 de moins.

Cet engin accomplit tout de même un exploit en atteignant, la première, les 160 km/h sur le circuit du Tourist Trophy, témoin de tant de victoires de la 350. Mais, c'était reculer pour mieux sauter : consommant presque autant d'essence que d'eau de refroidissement, et par là, contrainte à de fréquents arrêts, la V 4 expira, seulement quelques tours après sa belle performance...

On revint aux 350 avec la R7 (lancée en 1938) et la 7R (1949) ; cette dernière descendante de la lignée des 350 de 1920, se tailla de beaux succès dans de nombreuses épreuves pour ne terminer sa carrière que vers 1960.